• Let's get lost tonight

Allongé sur son lit, Jamie souriait. Avec cette foutue aura d’homme déprimé, il n’avait même pas le temps de lancer ses blagues. Le plafond était d’un blanc effrayant. Il brillait presque. A travers les rideaux s’infiltrait la lumière du croissant pointu de la lune et tout ceci donnait une atmosphère agréable pour un homme face à soi même.
- Et alors tu vois, l’homme au chapeau rentre et dit : Jamais je ne pourrai embrasser un autre cul de vache ! Je suis fidèle à ma femme !

Jamie rigola tout seul. Depuis peu il parlait tout seul. Il s’énervait tout seul. En y réfléchissant bien, jamais il n’avait eut de compagnon. Et cette sensation de solitude était nouvelle depuis quelques mois. Son enfance était vide de communication, son adolescence cloîtré dans un monastère il n’avait pas que prier et fantasmer sur les jupes des religieuses. Il se sentait bien avant…seul.
Voilà maintenant qu’il se remettait à penser à l’Islande. Son cerveau chancelait comme un bateau ivre à travers tous ses souvenirs. Il n’en avait pas vraiment beaucoup. La maison de l’Oncle Sam avec ses fenêtres jaunes, marron, noires. Le monastère où tous les paroles résonnaient pour demander le silence. Puis l’Angleterre. Le foot, les bons premiers meurtres.
Ce serait une erreur que de croire que la mentalité de cet homme a changé en un an. Jamie est resté toujours le même. N’adressant pas grand importance à la vie humaine. Elle n’a pas de prix, elle ne vaut même pas un sou. Il pourrait tuer sans cligner des yeux. Il pourrait frapper des femmes, poignarder des enfants que le sang de ses mains ne lui semblera pas plus horrible qu’après l’égorgement d’un bœuf. Ce qui avait véritablement changé en lui c’était son propre monde. Celui des autres il demeurait gris et nul. Avec ce malheur dominant et collant comme le miel rempli de guêpes agressives. Ce qui avait changé c’est son microcosme. Les gens qu’il voyait, les gens qu’il appréciait, ceux qu’il aimait, ceux qu’il avait aimé, ceux qui l’aimaient…
Jamie serra les dents. Celles ci grincèrent comme un accord de violoncelle cassé. Il avait apprécié… non il avait aimé Cassidy, ce bon vieux démon tout gentil. Si seulement il ne s’était pas prit pour un héros…si seulement…
Que de la rancœur dans son esprit ! Jamie n’arrêtait pas de s’imaginer les choses se passer autrement et ceci le rendait dingue. Mais une part de lui, la part raisonnable, est consciente qu’il est mieux ainsi. Aurait-il évolué un jour si tout ce chamboulement n’était pas arrivé ?
Jamie songea à Enya, sa sœur jumelle qui était si différente et étrange. Pendant toutes ces années elle avait prié pour qu’il soit en bonne santé… Elle était définitivement barje. Pas mieux que les vieilles du monastère. Si elle l’avait aimé à ce point, pourquoi n’être pas venu le chercher en prison ? Ou essayer de retrouver sa trace… Au lieu de ça elle priait Dieu, et à quoi bon ? Prendre soin d’un tuer à gages ?
- Vraiment, le monde est fichtrement mal foutu…

Jamie soupira et fit grincer les draps sous son dos. Il écouta attentivement le silence pour essayer d’entendre un bruit qu’aurait fait Lily dans l’autre chambre, mais rien. Se retrouver papa poule à 30 ans, sans avoir jouit auparavant n’avait pas été dans ses plans. Puis un tableau se peigna dans sa tète. Lui en père, avec un gros cigare dans la bouche, dans un gros fauteuil en cuir noir avec un costar chique. Puis Kayliah, les mains sur ses épaules, souriant en épouse fidèle et fière. A coté d’eux se tenait Charlie, la fille aîné, avec une robe rose et la tète légèrement penché de côté, tenant par la main Lily.
Charlie tenant par la main Lily…
Kayliah en épouse…fidèle…
Jamie en costar…
Y avait-il vraiment un monde parallèle où les choses se passaient ainsi ? Espérant que tout ceci n’était qu’aberration, Jamie se leva lentement de son lit. Assit, il enfila son t-shirt froid qui fit frissonner sa peau, debout il étira ses mais et fit craquer ses os fatigués.
Cassidy ! Il avait oublié de caser Cassidy dans son image de la famille parfaite. Finalement, c’est bien lui qui l’avait laissé avec un enfant sur les bras.
- Alors ce sera Cassy le père, moi l’épouse, Kay sera…hmm. La bonne. Et Charlie et Lily les enfants. Mais Kay a pas vraiment l’allure de bonne…quoi que. Nan ce sera mon deuxième mari tiens…
Jamie traîna ses pieds jusqu’à la porte de la chambre de Lily.
- Oh Cassy ! Va je ne te haïs point ! Toi qui m’as laissé avec un enfant sur les bras et eincente !…bref.

Jamie rigola. Sa gorge ressentit un peu de picotements et ses yeux acidulés lui brouillèrent la vue. ‘Un Kusochiky ne pleure pas !’
Mais Jamie ne s’appelait pas Kusochiky, et encore mois Jamie. C’était un Brarick et les Brarick abandonnaient leurs enfants.
Si ce n’était pas pathétique toute cette histoire ?
L’homme ressentit un souffle chaud derrière lui et son regard se tourna dans la pénombre. Il rencontra deux étoiles d’yeux brillants dans l’encadrement de la porte. Plutôt petite, les bras croisés et avec un sourire que Jamie n’avais jamais pu cerner mais qui se distinguait même dans le noir, Kay était adossé au coin de la porte. Il ne l’avait pas entendu entrer. Elle était comme un chat dont les coussins atténuait tout bruit.
Un jour, faudra qu’il songe à verrouiller sa porte. Mais au fond, ça aurait empêcher cet effet de surprise qu’il avait à chaque fois qu’il retrouvait Kay dans son appartement. Elle avait des airs de sainte mais en même temps une queue de démon se balançait dans son dos. Jamie sourit. Dans la famille, Kayliah aurait sans doute eut la place du père ou de la mère possessive, général en chef.

Foutu sang de démon qui ne voulait pas partir de ses vêtements…
Cela faisait une dizaine de minutes que, debout devant son lavabo, dans la salle de bains, Kayliah frottait son t-shirt sous l’eau qui coulait du robinet, essayant en vain de faire partir les tâches brunes du vêtement. Pourquoi avait-il fallu qu’en allant chasser ce soir là, elle mette son t-shirt préféré avec des souris ? Quel gâchis ! Elle n’avait même pas envisagé la possibilité de tomber sur ce troll gluant qui dégageait une odeur nauséabonde. Et elle aurait dû. De nos jours, à Cleveland, ou du moins, ce qu’il en restait, on pouvait être sûr de rien, absolument tout pouvait arriver. La preuve, elle avait oublié de passer au centre commercial la journée, dormant comme la dernière des marmottes pendant plus de dix neuf heures d’affilée, et elle s’était retrouvée sans thé vert. Et Kay sans thé vert, elle devenait redoutable et agressive. C’était pour ça que, sans plus attendre, dès que le soleil disparut à l’horizon, elle se dépêcha de sortir, ayant un grand besoin de respirer, et qui sait, de se défouler un peu par la même occasion. Un vampire, un démon, n’importe quoi, mais pourquoi cette… espèce de troll qui sentait comme s’il avait passé toute sa vie à se mariner dans du thon moisi ?

Voyant que ses jointures avaient horriblement blanchis à cause de la force démesurée qu’elle y mettait, Kayliah s’arrêta et poussa un soupir exaspéré, avant de lever ses grands yeux bleus vers le miroir, accroché au dessus du lavabo. Ses cheveux noirs, rassemblés à la va-vite en une queue de cheval – ou quelque chose qui y ressemblait très vaguement -, étaient en bataille, et elle avait l’air affreusement fatiguée. Peut-être parce qu’elle l’était vraiment ? Fatiguée de cette vie, de cette existence minable qu’elle menait depuis la mini-apocalyse qui avait fait sauter la ville. Peut-être qu’elle aurait mieux valu qu’elle y passe, ce jour là… Au moins, elle ne serait pas là, à se lamenter sur son sort, chose qu’elle détestait le plus au monde. A quoi était-elle en train de penser, bon sang ?!
La jeune femme étouffa un petit gloussement nerveux et ferma le robinet, ne faisant même pas attention à l’eau glaciale qui en coulait depuis de longues minutes, et qui avait complètement gelé ses mains. Elle garda sa main sur le robinet, la tête baissée, et les yeux fermés, comme pour essayer de chasser des pensées idiotes qui venaient de traverser son esprit déjà bien tordu.

« Quelle putain de connerie à la con ! » souffla-t-elle entre deux nouveaux petits rires un peu forcés.

Si de là où il se trouvait, - bien que Kayliah n’avait jamais cru à ces absurdités de ‘Ils te surveillent depuis les cieux’ – Hiroshi avait eu le malheur de l’entendre, il s’était sûrement retourné dans sa tombe sous le choc. La chasseuse esquissa un fin sourire nostalgique en repensant à cet homme qu’elle avait aimé plus que ses propres parents, plus qu’elle-même… Ce bouddhiste coincé et snob qui pensait qu’à ses seize ans, elle imaginait toujours que les enfants naissaient dans les choux. Celui qui manquait de s’évanouir lorsque, énervée par les règles trop strictes à son goût du Temple, et l’attitude exaspérante de ses confrères, elle s’exclamait ‘Mais je les emmerde ces cons de moines !’. Celui qui l’avait élevé, et qui lui avait apprit à ne pas laisser la colère la dominer. Alors pourquoi maintenant qu’il n’était plus là, elle ne pouvait plus se contrôler, abandonnant son cœur meurtri par les souvenirs, à l’étreinte des ténèbres et de la colère ?
Elle plissa plus fortement les paupières, fronçant les sourcils. Elle était devenue faible, manipulée par ses émotions. Ces foutues émotions qu’elle avait passé plus de dix ans de sa vie à essayer de contrôler, s’entraînant à garder son sang froid dans n’importe quelle situation. Tout ça, c’était en train de partir en fumée. Comme sa vie en général.

Elle n’avait plus de thé vert.
Kayliah regarda son t-shirt, dans un état toujours aussi misérable qu’il y a dix minutes. Elle le posa de côté et quitta la salle de bains, éteignant la lumière. Si elle allait continuer à le frotter, elle péterait vraiment un câble et chercherait à se suicider en regardant la dixième saison des Frères Scott non-stop pendant une semaine. Le peu de magasins qui étaient fréquentables en ville, étaient fermées à une heure pareille. Sans parler du centre commercial. Et c’était un peu trop loin, aussi… Ses pensées sombres ne tardèrent pas à être dissipées par un petit rayon lumineux qui portait le nom de Jamie. Quand elle était mal et sans thé, c’était lui qu’elle allait voir. Au fond, les Mousquetaires qui n’étaient plus que trois désormais, se soutenaient tous. Ils étaient, à eux trois, tous rattachés au passé, un passé qui pouvait sembler douloureux, que certains auraient préféré oublier. Mais ils avaient tous vécu et survécu à l’ancienne histoire de Cleveland.

Jamie. Quand elle l’avait rencontré, il s’appelait encore Wayne, mais était déjà assez timbré. Et leur relation ne fut pas des plus amicales, même si, d’un côté, Kay se reconnaissait en lui. Mais indépendante et têtue comme elle était, elle préférait de loin lui tenir tête dans tout et n’importe quoi, ripostant et montrant ses griffes, même quand c’était inutile. On aurait dit deux gamins capricieux à l’époque. Et depuis le temps, en dépit de tout ce qu’il s’était passé, ils continuaient à se lancer des vannes. C’était sûrement un des moyens pour ne pas laisser leur faiblesse les emporter définitivement dans un élan de nostalgie fugace que tous les deux détestaient. En moins de dix minutes, elle fut devant le Wayssidy’s. Et déjà, elle sentait un sentiment chaleureux se répandre dans son être, apaisée à la vue de cet endroit qui lui semblait plus familier même que son propre appartement. La maison d’Hiroshi avait été détruite au moment de l’explosion… Et puis, même si elle ne l’aurait pas été, Kay doutait fortement qu’elle aurait eu le courage d’y revenir. Cette maison, rassurante malgré l’air vieux et abandonné, était devenue hostile et emplie d’une tonne de souvenirs très particuliers. Et la jeune chasseuse redoutait bien plus d’être confrontée à ça, qu’à une horde de démons assoiffés de sang.
Sur la porte vitrée, la pancarte « CLOSED » était plus qu’explicite, et il n’y avait pas de lumière au premier étage. Kayliah leva les yeux et regarda les fenêtres au dessus. Une faible lumière tamisée et à peine visible provenait de la pièce qui était la chambre. Sa main se posa sur la poignet de la porte, la peur qu’elle soit verrouillée ‘pour de vrai’ l’étreignant l’espace d’une seconde. Mais celle-ci se laissa tourner, et elle pénétra à l’intérieur, un léger sourire rassuré aux lèvres. Si Jamie aurait verrouillé, elle aurait gueulé en dessous de sa fenêtre. Elle avait déjà pensé à une sérénade d’amour. Tant pis si ça allait réveiller Lily, de toute manière, Kayliah et les enfants, ce n’était pas fait pour s’entendre. Elle ne les détestait pas, mais elle ne savait jamais comment agir avec eux. Elle faisait des efforts, se donnait corps et âme dans les changements de couches lorsque Jamie lui faisait ses yeux suppliants. Mais malgré tout, elle se comportait avec le bébé comme avec un petit sac de patates.
Elle ne savait même pas comment le tenir, surtout quand Lily se mettait à pleurer… Secouant ses bras maladroitement comme si on lui avait mit une crêpe brûlante entre les mains, Kayliah commençait à faire des bruits stridents en même temps que le bébé, couvrant parfois ses pleurs avec le très connu ‘JAMIIIIIIE, VIENS M’AIDER, BORDEEEL !’. La seule chose qu’elle arrivait à gérer comme une pro, c’était la partie où elle s’occupait de faire rire Lily, en jouant avec elle. Et il était inutile de dire que côté jeux, Kay ne manquait pas d’idées. Elle allait jusqu’à dénicher Dieu sait où des oreilles de lapin pointues et un nez rose, sautant devant la chaise haute sur laquelle était installée la petite fille. Et elle y mettait tant de passion, qu’elles riaient toutes les deux.

Ses pieds se posant sur les marches sans aucun bruit, tel une féline, elle monta l’escalier pour arriver au deuxième étage, là où se trouvait l’appartement de Jamie. Elle entendit la voix de ce dernier, et retint sa respiration, se concentrant pour mieux écouter. Il était en train de parler tout seul, et un sourire en coin étira les lèvres de la chasseuse à cette pensée. A elle aussi, ça arrivait. Peut-être moins souvent, et dans d’autres situations, mais ça arrivait.
Une petite grimace apparut sur son visage délicat, alors qu’elle saisissait enfin le sens de ses paroles. Plus ou moins. « …Cassy le père, moi l’épouse, Kay sera… hum. La bonne. Et Charlie et Lily les enfants. Mais Kay a pas vraiment l’allure de bonne… quoi que. Nan ce sera mon deuxième mari tiens… ». Une petite expression incrédule vint remplacer sa grimace. Tant d’émotions sur son visage en même pas une minute, c’était un exploit. Jamie la poussait à battre tous ses records.
Elle se cala contre le mur, le souffle coupé, se cachant dans un carré d’ombre, alors que Jamie sortit de sa chambre et marcha jusqu’à celle de Lily. Il ne l’avait pas vu. Elle se demanda alors ce qui l’a poussé à se cacher, alors qu’elle était venue le voir. Un instinct de chasseuse ? Ou tout simplement, une réaction de dingue ?
Il entra dans la chambre du bébé, et Kayliah resta un moment en arrière. Jamie avait reprit la parole, et elle ne put s’empêcher de rouler des yeux, manquant tout juste de glousser. Elle savait à quel point Jamie était affecté par la mort de Cassidy, mais n’osait jamais en parler. Elle savait ce que c’était, et ne voulait pas rouvrir les blessures qui n’ont même pas eu le temps de guérir, encore. De toute manière, Jamie n’en avait pas besoin, de sa pitié, ni de celle de qui que ce soit. Finalement, après un vague moment d’hésitation, la jeune femme s’avança vers l’encadrement de la porte et s’appuya sur un côté, observant ce gros nounours jamais content qui adorait parler toute seul, qui s’était approché du berceau de Lily.

« Alors finalement, je serai la bonne ou ton deuxième mari ? » demanda-t-elle sans que son sourire en coin ne quitte ses lèvres fines. « Tant que je suis pas la cuisinière de la famille… Rien qu’avec mes pancakes aux olives vertes et au fromage, vous risquez de me mettre à la porte. Pourtant, c’est super bon. Quel cliché de ne jamais vouloir tenter des expériences nouvelles qui sortent de l’ordinaire. »

Le regardant attentivement pendant quelques secondes, elle finit par s’approcher de lui et regarda Lily qui dormait paisiblement dans son berceau. Elle avait l’air si fragile et sans défense, quand elle dormait. Presque un bébé normal… Kay poussa un petit soupir, essayant de cacher son air un peu attendri. Lily n’était pas un bébé humain, et à plusieurs reprises déjà, elle a réussi à leur prouver cela. Mais il n’y avait qu’à la regarder, dans ce genre de moments, pour sentir toute sa défense retomber. Comment pouvait-on ne pas fondre devant sa petite bouille ? Lentement, la chasseuse tourna la tête vers Jamie et le dévisagea attentivement, le scrutant de ses grands yeux d’un bleu océan.

« T’as une mine affreuse... Est-ce que t'as du thé vert ? Au jasmin ? »

S’il y avait bien quelque chose que Kay n’avait pas perdu de son caractère, c’était sa franchise et sa manière ‘excessivement libre’ d’exprimer ses pensées…

Jamie cligna des yeux et dans la pénombre il n’avait pas comprit qu’on lui parlait, qu’une folle s’était introduite chez lui pour lui demander du thé et le pire, qu’elle l’avait entendu décrire sa famille parfaite. Il secoua la tète, recula un peu sous le choc, alors que ses poumons jouaient au basket avec son cœur. Ah que oui, il avait un mine affreuse. Il n’était rien d’autre qu’un humain bordel ! Il n’a jamais prit des cours de spiritisme ou de voyeurisme (han?) pour ressentir la présence étrangère d’une Kay à la recherche de thé. Elle ne semblait pas voir qu’il était choqué à mort, et au fur et à mesure qu’il reculai pour trouver de l’appui contre un mur, la fille semblait s’impatienter et attendre une réponse. Pourtant ce n’était pas la première fois qu’elle se glissait sans bruit, pour soudain commencer à lui parler. Il avait vu ses deux yeux dans l’encadrement de la porte et n’avait hurlé de peur, mais au fond de lui, Kay l’effrayait. Et pas seulement parce qu’elle pourrait s’introduire chez lui et lui voler son thé, mais à cause de sa personnalité changeante et cette façon étrange de dire les choses comme elles sont, sans maquiller la réalité. Kay aurait pu dire ‘Hey, j’avais envie de te voir. Comment tu vas ? On se fait un thé pour parler ?’. Mais tout ce qu’elle désirait était une boisson et l’idée de paraître agréable ne lui traversa même pas l’esprit. Son temps était précieux, plus précieux que la santé de Jamie. Ce dernier fit un bruit bizarre avec sa gorge, un mélange de cris d’éléphant étouffé et de charabia de bébé, qui était assez signifiant. Kay sembla se rendre compte qu’elle lui avait fichu encore une fois la frousse. Un petit rire s’envola dans les airs pour achever Jamie. Il s’assit sur une sorte de cheval en bois et passa une main sur son front.
- Rigole pas comme ça dans le noir. Tu viens de… de tuer les pauvres neurones qu’il me restait. Et j’étais nu entrain de regarder des revues porno ?! chuchota Jamie avec tout le sérieux qui pouvait accompagner sa phrase.
Il eut un moment de silence drôle avant de se lever et faire signe à la fille de le suivre dans l’autre chambre. Après avoir fermé la porte rose de la chambre de Lily, Jamie alluma la lumière et hocha la tète.
- J’ai du thé. Avec…tout ce que tu veux.
La fille le suivit du regard alors qu’il s’avança, hésitant à descendre en bas ou à aller dans sa cuisine. Il semblait tellement captivé par sa quête du thé que cela devenait presque risible. Jamie était toujours risible, et même lorsqu’il s’énervait ce qui arrivait très rarement, ou lorsqu’il avait le visage crispé par la morosité il avait toujours la bonne blague à la bouche qui empêchait de se lancer dans la réflexion profonde sur la vanité de la vie. [longue phrase n’est pas] Kay avant le même réflèxe, mais au lieu de rire, elle frappait ou hurlait. Cette fille était dangereuse et Jamie en était conscient. Conscient tout en gardant le sourire, car jamais elle ne pourra le tuer. Pour ne pas se retrouver avec Lily sur les bras, Kay serait prête à laisse la vie sauve à n’importe quel démon…
Quoi que, elle pourra toujours refiler l’enfant à une vieille dame stérile…
Jamie grimaça en se dirigeant vers la cuisine, ouvrant quelques placard avant de sortir un boite en métal froide qui fit un bruit sec et long lorsqu’il l’ouvrit. L’homme cligna des yeux encore. Tout un théâtre se passait dans sa tète. Maintenant, Kay était devenu sa maîtresse, et dans le joyeux portrait familial qu’il avait imaginé jadis, tout s’était écroulé. Cassidy mourra d’un cancer de la prostate, Jamie se remaria avec Kay’. Kay’ était une personne dangereuse qui envoya les enfants de Jamie à l’orphelinat et fit de lui un esclave soumit et obéissant. Alors qu’il remplissait le Chiaïnik avec de l’eau, il repensa aux conséquences. Finalement, le monde parfait et parallèle qu’il avait imaginé était tout aussi pourri que la réalité. Il entendait Kay s’approcher de la cuisine et se tourna avant qu’elle n’attrape un couteau et le lui plante dans le dos.
- Vos fantasmes sur le thé seront assouvis dans quelques minutes. Bien qu’il ne soit pas japonais, je vous propose de déguster du thé vert anglais… ou islandais. Je sais plus mais c’est vert.
Jamie sourit de toutes ses dents et tendit la boite de thé à Kay’. ‘Aller prends la, et quand tu l’aura, elle va exploser et boum plus Kay’…
L’homme secoua un peu sa tète. Aujourd’hui il avait décidément trop rêvé et trop bu. La journée avait été plutôt dure, et le soir promettait de l’être encore plus. Mais il appréciait la compagnie de Kayliah Sorokin… Rien qu’à prononcer son nom il s’imaginait décapité et sabré, mais elle était drôle sans le vouloir et avouons le, terriblement agréable à regarder.

Elle adorait lui faire peur. Pourtant, elle ne le faisait pas toujours exprès. Mais ses instincts de chasseuse la poursuivait même dans sa vie ‘extérieure’, lorsqu’elle n’avait pas besoin de se faire aussi discrète et être constamment aux aguets. A force d’avoir baigné dans un milieu où tout était basé sur le souffle, la concentration, et le silence, elle avait apprit à devenir aussi silencieuse qu’une panthère, pouvant entendre des bruits qui étaient normalement imperceptibles à l’oreille humaine. Un léger rire un peu cristallin lui échappa alors qu'il venait de reculer, l’air complètement choqué. Ils finirent par sortir de la chambre de Lily, et Kay croisa les bras sur sa poitrine tout en observant Jamie. Elle le suivit du regard alors qu’il allait dans la cuisine, restant un peu en arrière. Elle avait gentiment demandé, pourtant, non ? A ses yeux, la façon dont elle avait formulé sa phrase était très gentille. Enfin, la vision de Kay sur le monde et la façon de s’exprimer était à revoir…

Après avoir attendu quelques secondes, elle finit par le suivre, les bras toujours croisés et les sourcils un peu froncés quant à la remarque que Jamie venait de faire. Il savait plus, mais c’était vert ? Non mais, il lui donnait quoi à boire là ? La jeune fille plissa le nez, bien qu’un sourire ne tarda pas à apparaître sur ses lèvres rosées. Il était drôle, ce Jamie, un peu bizarre, mais elle était loin d’être normale, elle aussi. Les gens normaux étaient ennuyeux, de toute manière. Elle regarda pendant quelques secondes la boîte qu’il lui tendait, exagérant sur un air méfiant, puis finit par la prendre et rigola légèrement. En passant à côté de lui, elle fit exprès de le bousculer légèrement avec son épaule, s’approchant de la théière et posant la boîte métallique à côté, en attendant que l’eau devienne bouillante. Elle prit alors appui sur ses deux mains posées sur l’espèce de bar de la cuisine, et s’y assit avec agilité, laissant ses jambes se balancer dans le vide.

« Je t’aime Jam, tu sais ça ? » lança-t-elle avec un énorme sourire aux lèvres, attrapant à nouveau la boîte pour inspirer le parfum délicieux du thé vert.

Mais elle inspira un peu trop fort, et le nez plein de thé, elle éternua violemment, son pied venant taper avec un grand bruit le bar sur lequel elle était assise. Essayant en vain de respirer normalement, et tentant de bafouiller une excuse, elle fut prise d’un fou rire à la vue de l’expression que faisait Jamie en la fixant de ses énormes yeux, comme s’il allait se jeter sur elle et l’étrangler sur place. Elle toussa alors, se calmant peu à peu, et renifla bruyamment, essuyant les larmes qui perlaient au coin de ses grands yeux bleus.

« Désolée. » souffla-t-elle en expirant lourdement, comme si elle avait couru à travers toute la ville. Deux fois. « C’est gentil pour le thé et… pardon aussi d’avoir débarqué comme ça, à l’improviste, au milieu de la nuit. Je sais que c’est dans mes habitudes, mais bon. J’aurais dû prendre rendez vous avant, sachant que t’es un homme et un père occupé… » continua-t-elle d’une voix suave et moqueuse, inclinant doucement la tête de côté, ses iris ancrés dans les siens.

C’était difficile à imaginer, quand on avait connu Jamie en tant que Wayne. Jamais on aurait pu croire qu’un jour, il s’occuperait d’un bébé avec autant de détermination et… d’amour. Un peu bizarre, certes, mais c’était Jamie, après tout. Elle le voyait plus comme un type qui s’enfuit dès qu’il entend parler d’un bébé, même si ce serait le sien… Hors, là, Lily était un enfant étranger, sa mère ayant été tuée par le monstrueux vampire qu’ils avaient combattu durant la nuit de l’apocalypse, et son père, disparu sans laisser aucune trace. Et pourtant, Jamie mettait tellement de cœur à veiller sur elle. C’en était étonnant et attendrissant.

« Alors… » reprit la chasseuse en faisant une petite moue. « Comment va Lily ? Tu as l’air de la chouchouter toujours autant. » Elle soupira, exagérant sur son air dramatique, les yeux brillants de malice. « Parfois, j’aimerais être un bébé. »

Au fond, elle en était un. Un bébé qui aimait le karaté, et dont le jouet préféré était un katana, mais elle avait réussi à conserver ce côté enfantin malgré toutes les épreuves qu'elle avait dû traverser. Un air de femme enfant, forte et vulnérable à la fois, qui la rendait encore plus attachante et adorable.

- C’est pas moi qui changerai tes couches !!!!
Jamie regarda la fille avec contrariété et sérieux. Il en avait assez avec Lily. D’ailleurs les couches pour bébé était le meilleur objet de tous les temps, si jamais il avait dû laver quatre fois par jour les draps, ses mains aurait été comme des chewing gums. Puis il sourit se secoua la tète. Kay était déjà un bébé, à la voir jouer avec la boîte de thé et se dandiner sur une table de cuisine, on aurait dit une de ces lolitas qui confond le rose et les sabres. D’ailleurs, quelque part, et même par tout, Kay lui tapait sur les nerfs. Elle était petite, brune et pourtant, des fois elle avait un de ces airs de Pamela de Malibu que Jamie restait les yeux-bouche-bée. Au début, il lui avait fait croire qu’il était un vieil ami de son père et elle avait gobé. Comme quoi, elle aussi se laissait emporter par ses émotions. C’était sûrement à cause de la tète de Jamie, qui n’inspirait pas confiance, qu’il avait autant de facilité à se faire croire. Qui mentirait avec une apparence si peu crédible ?
Il l’avait trouvé très belle. D’ailleurs, il la trouve toujours, mais le comportement de la fille lui décrocha de nombreuses grimaces suivit de sourires inquiets. Voilà certainement pourquoi il avait l’impression d’être effrayé par elle. Kay’ n’avait absolument aucune cohérence dans son attitude. Regardez Charlie, ça c’est quelque chose de cohérent ! Elle tue, elle a une vie difficile, elle déprime. Un enchaînement parfait de choses qui s’emboîtent tout à fait. Mais Key… Kay’ tue, Kay a une vie difficile mais elle cherche du thé vert à une heure du matin.
Elle prétend brûler d’une joie de vive qui là faisait à ce moment même, s’exciter sur une table de cuisine et avec une boîte de thé. Elle prétend ou est-ce vraiment l’état d’esprit qui la dominait ? Une question bien louche, sans réponse, qui rendait le problème encore plus étrange. C’était peut être ce trait de caractère, ce je-m’en-foutiste parfaitement maîtrisé par la jeune fille qui faisait peur à Jamie. Lui aussi tue, il a une vie difficile et pourtant il parle de couche pour bébé.
Mais il n’y avait pas vraiment de parallélisme entre c’est deux humains. Ils ne se ressemblaient pas et d’ailleurs n’était pas fait pour se comprendre. C’était juste une suite de coïncidences, la situation, les événement qu’ils vécurent qui leur permit de se supporter mutuellement. Jamie ne voyait plus Kay comme une hystérique bien gaulé, mais comme une chasseuse optimiste. Et Kay voyait Jamie comme…

L’homme glissa sa main dans ses cheveux emmêlés et légèrement mouilles pour se gratter la tète. Il ne savait pas de quelle façon Kay le voyait. Un débile qui a changé sa façon de vivre en un jour, un cinglé ou alors quelqu’un qui a basculé du côté sentimental de la vie. De toute façon, depuis quand s’inquiète-il de son apparence ? C’était bien un point sur le quel Jamie resta wayne.
Il s’adossa au mur, croisa ses bras, et regarda longuement l’eau qui chauffait. Un silence vitrée [han ?] s’installa dans la pièce. Puis Jamie s’avança, il attrapa l’eau bouillante, une tasse et la boîte de thé des mains de Kay. Quelques instants et il déposa l’objet des désirs de Kay, à côté d’elle.
- On se demande ce que tu ferais sans moi ! Le thé, et maintenant les couches…
Il attrapa une chaise, la mit à l’envers et s’assit. Il adorait faire du cheval sur les chaises, mais bien entendu, il n’allait pas commencer à crier ‘ Youhou, à l’attaque aux indiens’ plus par fatigue que par peur d’effrayer Kayliah. Il commença alors à mordre le bout de la chaise et levant les yeux vers la fille pour voir si elle boit son cocktail de la mort qui tue…
Jamie soupira de nostalgie car oui, depuis peu il aimait penser à son passé comme une vieille femme dans une maison de retraite. Cassidy était le seul qui lui avait fait du thé. D’accord c’était de la bière. Mais tout de même, il n’y avait eut que lui pour lui servire à manger.
Il mordit plus fort le bord de la chaise [complètement barje] et roula des yeux. Heureusement Kay ne pouvait pas lire dans les pensées, si non, elle l’aurait prit pour un dérivé de Boris Moeseizv.

Kay ne fit rien d’autre que pousser un petit soupir suite à sa remarque. Le changement de couches, c’était le grand problème. Elle avait bien plus peur que ce soit son ‘tour’ de changer Lily que de croiser une armée de dix démons psychopathes dirigée par ce troll gluant et puant qu’elle avait combattu un peu plus tôt dans la soirée. Hiroshi lui avait apprit tellement de choses utiles sur le combat et le contrôle des émotions, mais rien sur les bébés et les hommes. Enfin, les hommes, ce n’était pas un souci, elle avait apprit toute seule. La chasseuse leva les yeux vers le plafond, soudain intéressée par les tâches sombres qui s’y trouvaient. Bizarrement, depuis tout ce temps qui s’était écoulé, elle n’avait jamais repensé à leur rencontre. Et il fallait avouer que celle-ci avait été des plus étranges. Si Kayliah ne voulait pas s’en rappeler, ce n’était pas parce qu’elle avait plus ou moins détesté Wayne dès qu’elle l’avait vu, mais surtout parce que ce souvenir était très intimement lié à un autre, auquel elle ne souhait pas du tout repenser. Tout était lié, hélas.

Il avait raison sur un point, au moins, Kay n’avait pas du tout une attitude cohérente par rapport à ce qu’elle était en train de vivre. Mais sombrer dans une dépression, ce n’était pas pour elle. Quand elle se sentait mal, elle s’enfermait dans sa salle de bains, frappait le mur, pleurait, mais elle en ressortait toujours une demi heure plus tard, un sourire aux lèvres, comme si de rien n’était. Elle n’allait pas se laisser dominer par sa colère et sa tristesse, parce que son Maître le lui avait apprit. Elle l’avait très certainement déjà beaucoup déçu à travers ses actes. Que ce soit sa relation brève et insensée avec le vampire pour qui, à la base, elle avait débarqué à Cleveland, ou dans des choses parfois très peu humaines qu’elle avait pu faire depuis. Elle l’avait déjà beaucoup déçu, mais elle ne voulait pas que ça recommence. Et aussi curieux que cela puisse paraître, malgré la rage qui la consommait parfois de l’intérieur et cette envie fugace de voir tout prendre fin, elle n’avait jamais eu des penchants pour le suicide. Elle serrait les dents et avançait dans la vie, parce que c’était la dernière chose qui lui restait. Vivre. Non pas pour être une héroïne, mais pour se prouver à elle-même qu’elle n’était pas faible.

La jeune fille reporta son regard sur Jamie qui s’était avancé et suivit attentivement le moindre de ses gestes, pendant qu’il préparait son thé. Le parfum dont la cuisine s’imprégna, lui redonna aussitôt le sourire, comme le plus délicieux des bonbons au chocolat qu’on aurait montré à une petite gamine. Kay aimait les sucreries. Sa gourmandise était parfois effrayante. Mais ce qu’elle aimait le plus, c’était le thé vert. Même si son préféré restait celui au jasmin, l’odeur de la menthe qui avait empli la pièce était toute aussi agréable. Elle se racla la gorge, comme pour se convaincre d’attendre un peu avant de se jeter sur cette tasse qui l’appelait silencieusement, et attendit que Jamie aille s’asseoir sur une chaise, non loin, avant d’attraper son thé. Alors qu’elle trompait ses lèvres dans la boisson chaude et parfumée, Jamie commença à mordre le bord de la chaise sur laquelle il s’était assis, ce qui la fit glousser malgré elle. Reposant la tasse à côté pour ne pas se brûler, elle se passa une main sur le front.

« T’as des tics nerveux encore plus étranges que moi. Je suis rassurée. » souffla-t-elle avec un sourire à peine visible, les yeux bleus légèrement plissés dans une expression amusée. Mais en même pas une fraction de seconde, elle retrouva son air sérieux, le regard océan troublé, presque grave. « Jam, je peux te poser une question ? » Elle n’attendit pas une réponse et enchaîna presque tout de suite. « Quand Lily sera plus grande, j’pourrai lui apprendre à se battre avec un sabre ? J’avais pensé au katana, mais ça, je crois qu’il faudrait attendre. Moi j’avais onze ans quand j’ai commencé à m’en servir, alors je te raconte pas tous les bleus que j’ai eu, en plus j’avais frappé un des moines… accidentellement… »

Elle s’interrompit, regardant avec curiosité l’air étrange que Jamie avait. En même temps, il y avait de quoi en avoir un, elle parlait vite et sans même faire une pause pour reprendre son souffle. Et puis en plus, elle lui avait un peu menti. Elle avait bien frappé un moine avec le katana, durant un de ces entraînements, mais ce n’était pas vraiment un accident, c’était ce qu’elle a fait croire à tout le monde, s’étendant sur des excuses et des ‘Oh Doux Jésus, ce que je suis malaaaadroiite, pardon…’. Il n’aurait pas dû lui faire tout un discours philosophique après l’avoir surpris à trois heures du matin, en train de voler des biscuits dans la pièce qui était, en quelque sorte, une cuisine du Temple. Enfin. C’était loin derrière, tout cela. Ca aurait été une chouette occasion de se sentir importante. Elle aurait presque pu reprendre le flambeau d’Hiroshi, marcher sur ses traces. En jurant, fumant, buvant de l’alcool, mais elle pourrait tout de même le faire. Même, elle était persuadée qu’elle ferait un prof bien plus chouette, pas aussi snob que le sien l’avait été. Elle pinça les lèvres, écoutant le lourd silence qui s’était emparé de la cuisine. Finalement, elle se racla bruyamment la gorge et regarda Jamie avec une petite moue.

« Enfin… J’ai pensé que ça aurait été une bonne idée. Pour qu’elle puisse se défendre. Quoi que je doute qu’elle ait besoin de mes conseils pour ça… » ricana-t-elle doucement, un joli sourire étirant ses lèvres.

- « En effet, je ne crois pas qu’elle aura besoin de violence. Il est hors de question qu’elle soit confronté à un quelconque danger et un objet tranchant ça en est un ! D’ailleurs lorsqu’elle grandira un peu, j’irais la placer chez ma sœur… enfin, dans un monastère tu vois… »
Jamie grinça des dents. Il prévoyait vraiment de demander à Enya, sa sœur de prendre soin de Lily. Et n’y avait aucun doute qu’elle accepterait, sachant déjà que l’enfant était loin d’être humain. Mais le fait que Kayliah sache ses plans ne faisait pas partie de ses projets. Il s’est laissé un peu emporté, mais au fond, il en avait rien à faire. Et d’ailleurs, il avait envie qu’elle sache tout ce qui se passait avec Lily. Qui à part-elle est intéressé à la vie de la petite fille ? Kay était bien la seule à pouvoir parler plus de 5 minutes des affaires de la petite, bien que d’un façon bien particulière. C’était ce qu’il appréciait le plus chez elle, après son allure apaisante à regarder… Bref, Jamie sourit un peu et se détacha définitivement du bord de la chaise.
- « Mais… mais… »
Il avait dû mal à jouer aux hommes sensibles et déprimés. C’était pas son truc, il avait besoin de crier et de sauter tout ce qui bouche… sur tout ce qui bouge. Le Wayne aurait déjà dragué mille fois Kay, il se serait déjà prit mille claques mais aurait tout de même continué. Mais au fond, qu’est ce qui l’empêchait de redevenir plus débile, comme avant.
Jamie grogna. Ce qui l’empêchait ? C’était bien le souvenir de Cassy qui lui serrait le cerveau. Pourquoi il a fallut qu’il crève ce démon avec des cases en moins ? L’homme fronça les sourcils, ne sachant pas lui même pourquoi ça le touchait autant. Pourtant…il n’avait pas passé une éternité ensemble. Il eut des gens dans sa vie aux quels il avait eut plus de chance d’être lié. Il songea à Anays, la vieille femme, son patron et la pute qui le baisait tous les jours pour même pas un sou. Puis les souvenirs s’enchaînaient. Son retour en Islande, sa sœur, la maison de l’oncle Sam ou plutôt les murs qu’il restait, le monastère, puis la mort d’Anays et l’absence de sentiment qu’il eut face à sa disparition.
Un silence s’installa, pendant que tout un film se déroulait dans la tète de Jamie, Kay l’observait un peu sceptique. L’homme ne pouvait pas arrêter le flux de pensées et ce ne fut que le raclement de gorge de la fille qui le tira, heureusement, de ses songes funèbres.
Il divaguait trop, il allait péter un câble. Se massant un peu le crâne, il décida de continuer sa phrase…
- « Mais… mer…merci de t’inquièter »
Dur, dur d’être gentil. Et encontre plus d’être sincère avec soi même. J
- « Maintenant que tu t’es lancé dans cette grande discussion qu’est Lily, j’aimerai t’embêter avec quelque chose… »
Elle écaquilla les yeux, la tasse collé à ses lèvres. Il n’allait tout de même pas demander de changer les couches ?
Mais le souci avec Jamie c’est qu’on savait jamais quand il était sérieux. Même maintenant que sa personnalité était devenue plus grave et posé, il était toujours barje. Et ses rares moments de séreuse-attitude ressortaient que rarement avec Kay et Charlie.
- « Elle, elle a un pouvoir qui se manifeste déjà… »
Jamie s’arrêta pour voir la réaction de la fille. Il ne l’avait jamais dit explicitement, mais elle savait que Lily était bel et bien l’enfant qui allait être sacrifié. Si jamais Kay ne voudra pas écouter les craintes de Jamie, il comprendrait mais il deviendrait également dingue, car malgré tout, Lily lui fichait la trouille.